RETOUR VERS LE FUTUR :

MAIS OÙ EST L’ESPRIT DE 1985 ?

Avec cette rentrée, la troisième de la réforme de la TVP, l’orientation est toujours aussi mal assurée, le manque de professeurs face aux élèves progresse et les savoirs fondamentaux exigés sont encore trop superficiels.

Ces constats sont récurrents mais sont amplifiés avec les conséquences néfastes de la réforme de la voie pro et la Covid. Elles sont les deux facteurs explicatifs de l’amplification des maux dont souffrait déjà la voie professionnelle.

Les familles de métiers, qui ne cessent de pousser comme des champignons (14 en 2021), regroupent des formations sous des appellations aussi farfelues qu’incompréhensibles mais légitimées par des soi-disant compétences communes. Ces regroupements de compétences génériques complexifient le choix de l’orientation et réduisent les places en LP et par voie de conséquence les postes. Il n’est donc guère surprenant de retrouver des élèves perdus dans des formations ne correspondant pas aux vœux préférentiels des élèves. L’orientation par défaut est encore plus vraie. Déjà que ces derniers sont envoyés ex abrupto en LP car ont un profil d’élèves en échec scolaire, la démotivation et la surprise de subir des cours professionnels plus théoriques que pratiques parachèvent l’œuvre ministérielle de la dénaturation de la formation en LP. Nous sommes à des années lumières de l’esprit de la création du Bac Pro en 1985 !  Il est bien utopique de penser aujourd’hui que la motivation de bons élèves de 3é, le recrutement d’élèves par entretien et d’attribuer un caractère élitiste au LP pourraient se substituer à la sélection si efficiente actuelle d’affelnet. 

Face à cette déconstruction de la formation professionnelle, la situation des PLP ne fait qu’empirer avec des postes qui disparaissent, des départs à la retraite non remplacés, des BMP qui deviennent la norme. La Covid a ravagé l’enseignement en face à face pédagogique : le distanciel ne permet en rien de maîtriser les savoirs et les gestes fondamentaux. La crise du recrutement et la dévalorisation du métier n’aident pas. De moins en moins de postes au concours, certains d’entre eux se ferment et une affectation inter puis intra qui ne privilégient en rien les néo-titulaires. Enseigner en compléments de service ou comme TZR avec des ISSR contestées et payées très en retard par les rectorats sont le quotidien de nos collègues… Et on n’évoquera pas les violences, les incivilités et les pressions des hiérarchies intermédiaires. Voilà la réalité des PLP et des nombreux contractuels mal traités par l’administration en lycées professionnels.

Cette troisième année de la TVP est marquée par une accentuation de pertes d’heures disciplinaires. Les heures de chefs d’œuvre et de cointervention sont inégalement appliquées et souvent assurées sans respecter les textes, enseigner en binôme et non seul pour ces dispositifs. Le résultat est le prolongement de cours dans des conditions de classes entières infructueuses. Revenir à des heures de disciplinaires dédoublées ne sont que l’évidence même. L’AP n’est pour beaucoup de PLP qu’une variable d’ajustement payées en HSE ou un moyen de compléter leur service avec des sections pour lesquelles ils n’ont ni de cours pratiques ni de blocs disciplinaires. Quelle belle leçon de pédagogie !

En terminale bac pro cette année, la mise en place de modules d’insertion ou de poursuites d’études pose des problèmes d’EDT mais surtout d’organisation pédagogique. En réalité ces modules donnent lieu en majorité à des cours de rattrapage ou de soutien.

Mais il ne faut pas s’inquiéter, la machine est en marche. Même si la destruction de la formation professionnelle initiale en LP est constatée par tous les professionnels du privé, entreprises et tuteurs de stages, la DGESCO a trouvé la parade pour qu’un élève de bac pro puisse obtenir son diplôme avec les PFMP réduites de moitié, des épreuves pros sur-coefficientées et l’oral de contrôle avec une note de 8 aux épreuves du 1er groupe suffira.

Le SNALC ne peut que condamner ce sacrifice de générations d’élèves sous formés, de PLP malmenés et de la voie professionnelle outragée.

Il est temps qu’on revienne sur cette réforme inepte.  

 

Guillaume Lefèvre

Secrétaire national du SNALC chargé de l’enseignement professionnel

plp@snalc.fr

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